Oecuménisme (3)

Vers la fin du 19è siècle, la nécessité d’une meilleure coopération entre des églises visiblement divisées suscite la création des premières organisations internationales, qui donneront à leur tour naissance au Conseil Oecuménique des Eglises en 1948. Seules des églises ne prétendant pas être la seule expression authentique de l’Église “une, sainte, catholique et apostolique” sont partie prenante de cette création. Dans un premier temps, l’œcuménisme est donc le souci des églises protestantes. Du côté de l’Eglise romaine, il faudra être patient :

1896  : dans l’encyclique Satis cognitum, Léon XIII précise qu’« il n’existe qu’une Église de Jésus-Christ, celle qui est placée sous la responsabilité du pontife romain ». Quitter cette Église reviendrait à « s’éloigner du chemin du salut.»

1928 : Pie XI, dans Mortalium animos, interdit « toute relation avec d’autres communautés chrétiennes et tout contact avec le mouvement œcuménique.»

1962-1965 : Vatican II, publication du décret sur l’œcuménisme. Une percée majeure ! L’Église catholique romaine y constate que « de nombreux éléments de sanctification et de vérité » existent en dehors de l’Église catholique, et que « beaucoup d’actions sacrées de la religion chrétienne s’accomplissent chez nos frères séparés. ». Tout en insistant sur l’unicité de l’Eglise catholique unie au pape, « seule Église en plénitude », le concile propose « la prière commune, le dialogue doctrinal en vue d’une meilleure connaissance réciproque et du rétablissement de l’unité », ainsi qu’une « collaboration dans le service en ce monde ».

Oserai-je le dire ? Quoi qu’en disent les protestants, tutoyeurs de Dieu et s’affirmant sans autre maître que le Christ, le fait que l’Eglise romaine reconnaisse leur existence fut une vraie satisfaction pour les « frères (et sœurs) séparés ». Où en sommes-nous aujourd’hui ? L’œcuménisme avance sur quatre fronts.

Œcuménisme doctrinal : des discussions théologiques remarquables ont permis de dépasser les controverses traditionnelles (un exemple : Foi et Constitution). Les convergences, significatives, n’ont pourtant pas encore été suivies des conséquences souhaitables et déjà possibles. Si la levée des condamnations historiques n’est plus une utopie, on constate que la reconnaissance mutuelle n’est toujours ni pleine ni entière.

Œcuménisme spirituel : La semaine de prière pour l’unité est célébrée chaque année par catholiques orthodoxes et protestants, la Bible a été traduite ensemble entre 1977 et 1988. Si l’utilisation de la TOB est devenue une évidence, il faut se souvenir que son entreprise éditoriale était loin d’être une évidence ! Même si certaines églises évangéliques s’en démarquent, un œcuménisme spirituel est réellement vécu dans les paroisses et par des initiatives locales qui peuvent se démarquer des orientations des directions d’églises, dont les lenteurs et la prudence irritent.

Œcuménisme diaconal (dans le témoignage et le service) : Dimension centrale de l’oecuménisme avec la lutte contre la pauvreté, le racisme, la défense de la place des femmes. Voir les nombreux mouvements comme “Christianisme pratique”, “ACAT”, les programmes du COE comme Lutte contre le racisme, programmes d’éducation, d’aide aux réfugiés, de lutte contre l’exclusion et pour assurer la place des femmes, la place des jeunes, les “Justice, paix et intégrité de la création”…

Œcuménisme institutionnel : le mouvement est né en marge des églises constituées. Il était à l’origine l’affaire de quelques pionniers. À présent la grande majorité des églises a intégré le souci œcuménique. Services et commissions sont nombreux et entreprenants, mais traînent derrière eux une lourde et encombrante charrette. Des percées spectaculaires sont suivies de stagnations regrettables…

En cherchant à dépasser les barrières confessionnelles, nationales, sociales, culturelles et ethniques, en cherchant à promouvoir l’unité de l’Eglise, et de l’Humanité, l’œcuménisme connaît les joies et rencontre les difficultés qui caractérisent toute vie ecclésiale…

À des échelles différentes, des initatives  manifestent des avancée décisives et nourrissent l’espoir :

Dans la francophonie : le Groupe des Dombes. Un audacieux travail de fond vers la conversion des églises. Depuis 1936, initié par l’abbé Paul Couturier et le pasteur Richard Baümlin. « Toute conversion passe par l’aveu. Nos confessions ont à « se confesser », à passer de l’aveu de leurs limites et de leurs insuffisances, même de leur péché. Chaque famille confessionnelle doit reconnaître qu’il existe des éléments de tradition chrétienne qu’elle est incapable, au moins pour le moment, de recevoir et d’intégrer à sa propre existence ».

Localement : à Lyon, le CREL. Une collaboration au fil de la vie des églises et de l’actualité grâce à ce Comité des Responsables des Églises à Lyon. Sont membres du comité : Eglise Catholique ; Eglise Copte ; Eglise Arménienne apostolique ; Eglise Orthodoxe grecque ; Eglise Anglicane ; Fédération Protestante de France (représentée par Eglise protestante Unie de France et Eglise du Réveil) ; Eglise Baptiste. Cette instance de concertation est à l’origine d’initiatives diverses et nombreuses dont la création remarquable de la radio chrétienne RCF en 1982, la célébration annuelle commune de la semaine de prière pour l’unité des chrétiens, et des événements réguliers sont organisés en concertation.

Le père René Beaupère, par son rayonnement, a donné un élan extraordinaire à l’oecuménisme, jusqu’à faire oublier à certains que nous restions séparés… Combien de couples, de groupes ont été accompagnés par lui. C’est aujourd’hui, avec une reconnaissance émue, que nous voyons le Père Beaupère ou ses « disciples » (il ne voudrait pas du mot) participer activement à tout ce qui manifeste le chemin vers l’unité près et loin de la capitale des Gaules.

Sur la bonne cité caladoise, des célébrations communes ont lieu chaque année au cours de la semaine de prière pour l’unité des chrétiens ; l’Heure Sainte est préparée et vécue de façon œcuménique chaque vendredi saint depuis plusieurs années, et ici ou là des initatives comme la lecture et l’étude commune de la Bible participent à une connaissance mutuelle d’où chacun peut écoluer grâce à la prière, la rencontre et le partage. Nous ne désespérons pas de remettre à flots la pastorale caladoise qui naguère réunissait des caladois baptistes, pentecôtistes, évangéliques, protestants unis, et catholiques romains, sans oublier les aumôneries d’hôpital et de prison…

Heureux celui qui ne s’assied pas au banc des moqueurs, mais qui se plaît à la loi du Seigneur, et récite sa loi jour et nuit…

Soli deo gloria

Pasteur Franck Nespoulet

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