Voeux

À vos souhaits dit-on à quelqu’un qui éternue. Ma grand-mère disait que c’est très inconvenant de dire ça, parce que ça fait remarquer à l’enrhumé qu’il éternue bruyamment et quand on est « bien élevé » on ne fait pas de bruit, quitte à s’étouffer. Elle préférait dire « Dieu vous bénisse et vous fasse les bras comme j’ai les cuisses ». Ce qui n’était pas mieux.

 

Le mot vœu vient du latin votere : promettre, vouer (comme se vouer à une tâche). Le sens actuel se situe entre promesse, souhait et intention. Mais c’est aussi l’origine du vote, des fêtes votives, des ex-votos.

 

Promesse faite à l’origine à une divinité, pour se concilier ses bonnes grâces. En allusion au veau d’or, l’idole des Israélites dans le désert, on a pu parler de « vœu d’or ». La promesse, en forme de vœu c’est bien-sûr celle des religieux qui engagent (qui vouent) leur vie complètement ; mais c’est aussi celle de la marraine et du parrain, qui au Baptême s’engagent à une présence auprès de l’enfant, y compris pour suppléer les parents le cas échéant.

 

Dans l‘Ancien Testament, il y a des souhaits, notamment dans les Psaumes qui sont construits en gros de cette façon :

– Ah qu’est-ce que je suis malheureux !

– Si seulement tu pouvais faire quelque chose pour moi ! (c’est un souhait ?)

– Ah, tout va bien Seigneur tu es là. Et ça change tout ; on ne sait quel souhait est réalisé, mais peu importe, le Seigneur est là et ça suffit ; c’est pour ça que nous sommes Chrétiens : la certitude d’une présence dans nos vies.

 

Que souhaiter de plus ? Dans l’Évangile il y a peu, voire pas de vœux, au sens « Je souhaite que ». On trouve des demandes de guérison, « Fils de Dieu aie pitié de moi !»  « Fais que je retrouve la vue ! » s’adressant non à une divinité abstraite de manière superstitieuse – qui subsiste de nos jours quand on va « mettre un cierge » pour réussir un examen – mais à une personne reconnue pour son pouvoir de guérison, et surtout dont on savait qu’il ne faisait pas de promesses en l’air ; ce qu’il disait, il le faisait. Mais il rappelait toujours : « ta Foi t’a sauvé ». C’est la même chose pour passer l’examen, ça repose plutôt sur nous que sur l’intervention divine.

 

Pas de vœux, pas de souhaits dans le Nouveau Testament ; parce que ce qu’attendait le monde est arrivé : un sauveur nous est né ; heureux sommes-nous. « Mes yeux ont vu la Lumière du monde » dit Syméon (Évangile de saint Luc 2,25-34) C’est un constat pas un souhait. Nous n’avons plus rien a demander ; le pape Jean-Paul II avait d’ailleurs donné à la cérémonie des vœux la forme d’une offrande et d’une action de grâce. C’est ce que font les « fêtes votives » autour du saint de la Paroisse, ou des ex-votos remerciant pour une guérison inattendue.

 

Mais alors le « Notre Père » ce ne sont pas des souhaits, des vœux ? Pourtant, « Que ton nom soit sanctifié, que ton règne vienne, que ta volonté soit faite… » ce ne sont pas des souhaits ? Pas vraiment ; parce que tout nous a déjà été donné : « Vous avez reçu tous les dons. » (1° lettre de saint Paul aux Corinthiens1,3-9) C’est un programme d’action, à nous de nous mettre au travail, mais avec nos seules forces c’est impossible.

 

C’est ce que disait François d’Assise : « Commençons mes frères à servir le Seigneur Dieu, car jusqu’ici nous n’avons pas fait grand-chose. »

 

Bonne année, meilleurs vœux, à vos souhaits. 

Alain de Guido, janvier 2016