Andrée MOULOUD

 

 

Merci Andrée de nous accueillir au « Château du Loup », tu es ici depuis quelques années, mais tu es née à Villefranche… ?

Oui, je suis née à Villefranche : fille de fleuristes, avec le magasin juste en face du cimetière. Notre paroisse était Saint-Pierre. Après l’école du Nord, je suis allée à Notre-Dame sur le Boulevard. Nous étions quatre filles et à la Toussaint avec nos parents nous passions trois jours et trois nuits « sans quitter nos chaussures !»,  tellement nous avions de travail avec les fleurs. On faisait des croix, des couronnes, des compositions, des coussins… Tout en fleurs… !

Je suis rentrée chez les sœurs de l’Assomption trois ans, … je n’avais pas la vocation, et je ne me suis jamais mariée.

J’ai alors acheté une maison où j’ai élevé des enfants de la Ddass dès l’âge de deux ou trois mois : Ayed, Karim, Mourad, Tony, Laetitia, et aussi Nathalie et son papa, malade, qui est mort chez moi…

J’ai accueilli des gens de passage, ou Didier le boulanger qui est venu trois ans faire son pain dans mon four à pain.

Aujourd’hui je les revois tous, ils viennent me voir souvent et ils m’invitent…

Ayant de gros problèmes de dos, j’ai du vendre ma maison et je suis venue ici au Château du Loup.

Quelle aventure ta grande maison avec tout ce monde ?

Une vie avec toute ma tribu ! J’avais tous ces enfants en permanence, week-ends et vacances compris. C’était du travail : j’avais un potager, je faisais tous les légumes, toutes les conserves, les arbres fruitiers. J’avais aussi des moutons car j’avais 3000 m² de terrain. J’aimais cuisiner pour tous… Je faisais aussi toutes les conduites scolaires. J’avais de l’autorité : quand je demandais, ils obéissaient. Le dimanche, j’emmenais tout mon petit monde à la messe même ceux qui étaient musulmans !

Je voulais avoir un lieu de prière chez moi : j’ai fait aménager toute une partie de mon grenier en chapelle, ouverte à tous ceux qui voulaient venir prier jour et nuit. Il y avait bien du passage jusque tard le soir… Sur le côté de la chapelle, j’ai fait mettre une grande croix de plus de 2 m de haut que l’on voyait de la route… Il y avait la présence réelle et tous les jours j’allais y prier. Il y a eu aussi un groupe de prière charismatique régulier.

Le Seigneur m’a beaucoup aidée, il faisait comme il voulait, je lui faisais entièrement confiance…

Et venir ici au château du Loup ?

Voilà trois ans que je suis ici. C’est « ma fille » Nathalie qui m’a fait rentrer car je ne pouvais plus rester seule à cause de ma santé, surtout le dos…

Venir ici ? Tout a été facile pour moi, le Seigneur a fait pour que « ça soit comme ça !».

On est 80 résidents : je me sens bien ici, tout est  joie… ! Mais ce qui est dur, c’est lorsque quelqu’un meurt comme Mme Solly ma voisine : on pouvait bien discuter, on s’entendait bien… Elle faisait partie avec moi d’un petit groupe qui reçoit la communion amenée régulièrement par Denise Poulet. Sinon nous avons une messe tous les 15 jours.

Dans ma maison ou ici, je suis heureuse partout ! Je ne peux pas dire que je suis malheureuse… ! Le matin  je prie et l’après-midi, je participe parfois aux activités et je regarde la télé un peu : les jeux, les chiffres et les lettres…

Alors, ta foi dans toute cette longue vie magnifique ?

J’allais au groupe de prière et j’allais aussi régulièrement à la «famille Saint-Joseph» au sanctuaire de Mont-Luzin à Chasselay toutes les semaines pour prier et j’étais présente à tous les rassemblements en week-ends.

Aujourd’hui, je prie bien une grande partie de la matinée avec « Magnificat ». Tous les week-ends je vais chez une amie, Jeanne, qui habite Ars. Alors nous allons à la messe à la basilique. Je lis aussi des livres religieux… C’est ma foi qui mène ma vie !

Qu’est-ce que tu voudrais partager aux Chrétiens de Villefranche ?

– Soyez heureux, ça c’est sûr !

– Acceptez les choses comme elles viennent ! C’est ce qui rend heureux quand on ne les a pas choisies !

– Toute ma vie est centrée sur Dieu !

– Dans la prière évidemment.

– Mais surtout Dieu, je le reconnais dans tout le monde… C’est vrai !

Au moment de partir, Andrée a pris sa canne et, clopin-clopant, elle nous a invités à la suivre jusqu’à la chapelle de l’hôpital de Villefranche : trop heureuse de nous montrer la place où elle se faisait «bronzer au Soleil de la Présence Réelle» quotidiennement… ! Nous avons prié ensemble.


 

Propos recueillis par Martine et Yves Tricou le 30 mars 2012