Prévention contre les abus sexuels : la paroisse se forme

« Nous sommes ressortis plus forts mais surtout mieux équipés de cette session »

La paroisse Sainte Anne des Calades – par l’intermédiaire de ses prêtres et laïcs en position de responsabilité d’enfants – a répondu présent à la formation « Agir ensemble contre les abus sexuels » le 17 octobre dernier.

Cette formation, rendue obligatoire par le diocèse de Lyon, s’est tenue au domaine Lyon Saint Joseph, et avait pour objet de « sensibiliser les acteurs pastoraux à la prévention des abus sexuels sur mineurs et sur personnes vulnérables »[1]

Gérard Anthoine-Milhomme , laïc en Mission ecclésiale et responsable pastoral des jeunes de la paroisse St Anne témoigne : « Ma première réaction a été de « râler » à cause de ce mot que j’aime pas bien « obligatoire » et surtout par ce que je suis partisan de ceux qui disent que dans notre diocèse il est temps de tourner la page et de passer à autre chose ! Arrive le jour « J » et là deux choses me frappent : d’abord le nombre impressionnant de participants et la qualité de ce qui est proposé. De nombreuses vidéos (points de vue très différents) sont projetées, plusieurs témoins sont présents sur place : une journée riche. J’ai apprécié que l’on déplace le sujet vers la prévention et ce que nous dit la loi à ce sujet. Dans mes équipes d’animateurs (sacramentelle primaire/ aumônerie collège / Pasto Calad’JOIE) j’ai informé de l’existence de ces vidéos et rappeler ce que la loi nous dit sur la protection des mineurs et quelle est notre responsabilité d’adulte si on suppose un enfant en danger »

En effet, les outils pédagogiques imaginés par l’équipe de communication du diocèse, soit une série de 12 entretiens filmés réalisée avec des victimes, psychiatres, policier, magistrat, journaliste, théologien, prêtres, qui ont nourri et servi de support aux temps d’échanges avaient pour but de responsabiliser davantage les pasteurs sur le sujet.

Source: RTS

Voici quelques extraits :

 « En fait ce qui arrive à un enfant qui est abusé c’est comme s’il explose en mille morceaux. […] S’il vous plait écoutez vos enfants ! […] Je veux dire faire un signalement, aller à la police, écrire au procureur […] Si vous vous apercevez, si vous vous rendez compte de comportements inadaptés ou inappropriés surtout ne laissez pas faire surtout osez intervenir. » (Véronique Garnier, déléguée épiscopale pour la protection des mineurs et des personnes vulnérables à Orléans et victime d’un prêtre de 13 à 15 ans)

« Je crois qu’on devrait apprendre aux enfants depuis petits qu’on ne se confond pas avec le corps de l’autre, qu’on peut dire non, si on est approché, si quelque chose vous déplaît. Voilà vous n’avez pas à tout accepter d’un autre parce qu’il est plus grand, parce qu’il est dominant, parce qu’il est de la famille, parce que c’est un ami. » (Liliane Daligand, psychiatre, professeur émérite de médecine légale, expert de justice)

« Dès qu’il y a une interrogation, par rapport à la personne qui a ce comportement que nous on va qualifier de pas ajusté, il va falloir pouvoir l’interroger, en lui disant « je ne comprends pas la manière dont tu te positionnes ». A ce moment-là je suis en vigilance. » (Gérard Ribes, psychiatre et sexologue)

« En 2018, 125 mineurs ont été victimes de viol, dont 105 filles, et nous avons eu 241 mineurs qui ont fait l’objet d’une enquête pour agression sexuelle, dont 190 filles. » (Thierry Moulin, Major de police et chef d’un groupe d’enquête à la Brigade Départementale de la Protection de la Famille à Lyon)

« Maintenant le viol commis sur un mineur peut être poursuivi 30 années après la date à laquelle ce mineur atteint sa majorité. Ce qui fait qu’un mineur victime d’un viol durant sa jeunesse à jusqu’à l’âge de 48 ans pour déposer plainte. S’il s’agit d’une agression sexuelle sur mineur de 15 ans la prescription est à 20 ans. Et s’il a plus de 15 ans, la prescription est à 10 ans mais tout cela à compter du jour où il atteint sa majorité. » (Jean-Olivier Viout, ancien procureur général près la cour d’appel de Lyon)

« Le silence naît du silence des victimes, puis il y a le silence des familles, des parents, le silence des prêtres et le silence de la hiérarchie. » (Isabelle de Gaulmyn, rédactrice en chef du journal La Croix et lyonnaise)

« Il faut que les prêtres se sentent encouragés dans le long terme : un père spirituel , des amitiés construites, aller voir un psychologue (…) sans honte (..) et ne pas s’enfermer dans des impasses. Il faut travailler pour que tout prêtre soit entouré d’un réseau suffisant pour l’aider à assumer la solitude inévitable intérieure de chaque homme, qui est la solitude où Dieu veut nous rejoindre. » (Mgr de Moulins-Beaufort, président de la Conférence des Evêques de France, archevêque de Reims)

« Nous avons besoin de nous reconnaitre incompétents : l’Église a besoin de se reposer sur ce que la société nous propose. C’est un sujet éminemment douloureux mais il faut en parler. Il faut mettre des réalités derrière les mots, nous avons besoin que tous, nous soyons mobilisés pour que les conditions de possibilité de ces choses ne se reproduisent plus. » (Emmanuel Gobilliard, évêque auxiliaire du diocèse de Lyon et responsable de la communication)

Pour lire les vidéos cliquez ici: https://lyon.catholique.fr/agir-ensemble-contre-les-abus-sexuels/

Source: Libération

A la suite de cette formation, il a été décidé en EAP (Equipe d’animation pastorale) qu’une réunion d’information sera créée dans chaque mouvement de la paroisse en lien avec des enfants afin de former tous les encadrants et d’informer les parents.

« Cette formation obligatoire a été accueillie avec un réel intérêt et un profond respect tant le sujet était sensible et nous tenait tous à cœur. Que faire, que dire, quelle attitude avoir quand nous sommes en présence d’un jeune qui nous confie qu’il a été abusé par un adulte? Les « vidéos- témoignages » et la présence de personnes compétentes tels un magistrat, un policier, un psychologue, nous ont permis de comprendre l’attitude à avoir et ont clarifié ce que nous impose la loi, le secret de confession étant toujours sauvegardé. Le silence après les visionnages était la meilleure réponse. La simplicité des prises de parole et la force des témoignages nous ont fait sentir dans notre cœur, pour ne pas dire dans notre chair, le drame de ces victimes. Nous sommes ressortis plus forts mais surtout mieux équipés de cette session. Les vidéos sont en ligne sur le site du diocèse et de la paroisse et j’invite tous les éducateurs mais aussi les parents à prendre le temps de les regarder…. «  (Père Jorge Jimenez – Curé de la paroisse Sainte Anne des Calades)


[1] Source : lettre aux acteurs pastoraux du 1er octobre 2019 par Mgr Michel Dubost Administrateur apostolique du diocèse de Lyon